Installation, tapis de laine
148 x 261 cm
Deux artistes, deux perceptions de l’exil. D’abord un tapis rouge et blanc, évoquant l’univers épuré de Mona Hatoum. Opérant sur des objets familiers, domestiques et intimes, l’artiste les soumet à un traitement minimaliste pour nous livrer le récit de la Palestine à travers son propre vécu. « Les tapis décorant chaque pièce de notre maison de Beyrouth étaient les seules choses que mes parents et mon père purent sauver de ce qu’ils possédaient en Palestine. Dans mon esprit, il y a toujours eu un lien entre les tapis et la notion de territoire, les vies anéanties de mes parents et un terrible sentiment de perte », explique l’artiste. En effet, lorsqu’en 1948, les parents de l’artiste sont contraints de s’exiler au Liban sous la pression israélienne, seule une partie de leur importante collection de tapis est sauvée. Ces tapis rescapés allaient désormais recouvrir les sols de la maison de Beyrouth, ville natale de l’artiste. « Bukhara », tapis persan aux dessins géométriques représentant un planisphère, évoque à la fois la maison de son enfance et le nomadisme planétaire. S’il fait directement référence aux souvenirs de l’artiste et à son enfance, celui-ci symbolise également l’univers que l’on emporte avec soi dans l’exil, dans une perpétuelle tentative de reconstruire un « chez-soi ». Qui plus est, parce qu’il traduit l’appartenance à la culture islamique, le tapis devient une forme d’expression artistique affirmée qui se distingue de la conception artistique occidentale imposée par les conquêtes coloniales. Privilégiant la pensée à la forme, l’expression artistique en terre d’Islam se décline à travers l’intensité du signe et le raffinement de l’art décoratif. Comme rongée par les mites ou détériorée par un impact extérieur, le prélèvement de la laine fait apparaître des zones qui rappellent la mappemonde selon la Projection de Peters, qui présente tous les pays et les continents du globe selon leur réelle proportion les uns par rapport aux autres. Entre construction et déconstruction, ancrage et déracinement, les attaches de chaque nœud de laine, tissées jadis, sont dissoutes, traduisant un monde où tout n’est que migration et déracinement. Mona Hatoum articule une friction constante entre les notions de domicile, de protection, de chaleur, et leurs contraires.
A red and white carpet, evoking Mona Hatoum’s uncluttered world. Intervening on familiar, household and intimate objects, the artist subjects them to a minimalist treatment so as to deliver the account of Palestine through her own experience. “Carpets decorating every room of our house in Beirut were the only things my father and close relatives were able to rescue from what they owned in Palestine. In my mind, there has always been a relationship between carpets and the concept of territory, my parents’ destroyed lives and a terrible feeling of loss”, the artist explains. Indeed, when the artist’s parents were forced to go into exile in Lebanon under Israel’s pressure, only part of their significant carpet collection was saved. From then on, these rescued carpets covered the floors of their house in Beirut, the artist’s birthplace. “Bukhara”, a Persian carpet with geometrical drawings representing a planisphere, evokes at the same time the house of her childhood and the planet nomadism. While it directly refers to the artist’s memories and childhood, it also symbolizes the world one carries with them into exile, in a perpetual attempt to rebuild a place to call “home”. Besides, since it conveys the belonging to the Islamic culture, the carpet becomes an asserted form of expression that differs from the Western artistic design imposed by colonial conquests. Favoring the thought as compared to the form, the artistic expression on Islamic land shows through the intensity of signs and the refinement of decorative art. As moth-eaten or somehow deteriorated by an external impact, the wool removal reveals areas that recall the map of the world according to the Projection of Peters, that features all the countries and continents of the world according to their real proportion with one another Between construction and deconstruction, anchoring and uprooting, the formerly woven ropes of each node of wool are dissolved, showing a world where everything is nothing but migration and uprooting. Mona Hatoum constantly opposes the concepts of home, protection, heat, to their opposites.